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mercredi 10 décembre 2014

ONLY ANGELS HAVE WINGS – Seuls les Anges ont des ailes

Réalisation : Howard Hawks
Société de production : Columbia Pictures
Genre : Aventure
Durée : 121 minutes
Date de sortie : 15 mai 1939 (USA)
Casting :
Cary Grant : Geoff Carter
Jean Arthur : Bonnie Lee
Rita Hayworth : Judith « Judy » MacPherson
Richard Barthelmess : Bat MacPherson
Thomas Mitchell : « Kid » Dabb
Allyn Joslyn : Les Peters
Sig Ruman : John « Dutchy » Van Reiter


L’HISTOIRE

Une jeune femme débarque dans une petite ville portuaire d’Amérique du Sud, où elle fait la connaissance des aviateurs qui assurent le transport du courrier au-delà de la Cordillère des Andes, dans des conditions épouvantables et souvent très dangereuses.

L’AVIS DE FU MANCHU

Aujourd’hui voit le retour de Jean Arthur sur Films-Classiques, puisqu’après Mr. Smith goes to Washington où elle était associée à James Stewart, la voici avec Cary Grant dans un film sorti la même année, Only Angels have wings (Seuls les Anges ont des ailes).



Cette fois-ci, pas d’intrigue politique au menu, mais une plongée dans un monde exotique et impitoyable, celui des aviateurs de l’Aéropostale chargés de transporter le courrier dans les Andes. Cette immersion dans ce monde « d’hommes » est rendue de manière très intéressante dans le film, où l’on suit le personnage de Bonnie Lee (Jean Arthur), musicienne dont le bateau a fait escale dans ce petit port d’Amérique du Sud, découvrir la ville, ses habitants, son exotisme et, finalement les seuls autres Américains présents sur place : les aviateurs. Avec elle, on découvre le quotidien de ces hommes rudes, courageux, risquant leur vie pour mener à bien leur mission, comme désabusés par leur sort incertain mais prêts à continuer leur travail coûte que coûte…
Dans cet univers, peu de place est faite aux femmes, ni aux sentiments : pourquoi s’engager quand tout peut disparaître d’une minute à l’autre ? Forcés de continuer à vivre après la mort d’un des leurs, les aviateurs l’oublient comme s’il n’avait jamais existé : façade impitoyable, mais cœur lourd, car il faut bien continuer à vivre, et y retourner, encore et encore, dès que retentit l’appel…



Geoff Carter (Cary Grant), le patron des aviateurs et le meilleur d’entre tous, est l’incarnation de l’aventurier, rude, misogyne, passionné par son travail mais qui ne l’abandonnerait pour rien au monde. Cary Grant l’interprète de très grande manière, donnant au personnage une profondeur qui va au-delà de son cynisme et de sa goujaterie du premier abord : c’est à un homme blessé que l’on a affaire, rongé par les pertes humaines (la mort de ses confrères aviateurs, dont il se sent responsable) et sentimentales (la traîtrise de la femme qu’il aimait), et se protégeant par son machisme et une insensibilité de façade pour éviter de souffrir à nouveau.

Face à lui, Jean Arthur est Bonnie Lee, l’étrangère à ce monde, la femme normale à qui l’on va s’identifier et qui nous permet d’entrer dans le film. Comme elle, l’on va d’abord être choqué par l’absence d’humanité dont semblent faire preuve ces hommes, puis comme elle, on va les comprendre et les estimer. Sûre d’elle, pleine de vie, elle se fait rapidement accepter par les hommes qui l’entourent, et le potentiel comique de Jean Arthur réapparait le temps de quelques scènes pour alléger l’atmosphère du film (le piano, la scène du bain). Son alchimie avec Cary Grant prend peu à peu forme, et, pleine de surprises, c’est elle qui décide de rester pour tenter l’aventure d’une romance avec lui.

Dans ce film, deux personnages féminins se font d’ailleurs face : Bonnie Lee (Jean Arthur), la femme forte, capable de prendre ses propres décisions, voyageant seule, sûre d’elle et déterminée à se faire respecter en tant que femme. Et Judy (Rita Hayworth), la belle jeune femme, plus effacée, dans l’ombre de son homme et prête à y rester. Entre les deux, le film se positionne clairement, et seule une femme comme Bonnie était à même de séduire à nouveau un Geoff désabusé par la gent féminine et ne s’en cachant pas.

Centré sur Jean Arthur dans sa première partie, le film s’intéresse beaucoup plus aux pilotes dans la deuxième, avec l’arrivée d’un personnage très intéressant : Bat MacPherson (Richard Barthelmess), le traître, honni par ses pairs, mais dont la petite entreprise a désespérément besoin pour survivre. Calme, taiseux, il accepte sans broncher les missions les plus dangereuses, et rachète par son courage ses erreurs passées : symbole de ces hommes qui, perdus au milieu d’un monde étranger, sont comme forcés de tirer un trait sur le passé pour se fixer sur leur (court) avenir…

Symboliques aussi de ce monde enchanteur et sans pitié, telle la jungle sud-américaine, les scènes des musiciens placées au début et à la fin du film : cette musique douce et exotique, qui enchante Jean Arthur au début du film, a une résonance beaucoup plus mélancolique quand le film prend fin, comme une parenthèse dans ce monde si particulier qui se referme : lancinante, la mélopée semble pleurer les morts et célébrer le courage de ces aventuriers décidément hors du commun.



Conclusion

Only Angels have wings nous offre donc un film d’aventure très bien construit, nous plongeant dans le quotidien de ces hommes rustres puis nous montrant la part d’humanité qu’il reste encore en eux, et qui les aide à tenir dans cet endroit coupé du monde. Cary Grant porte le film côté masculin, bien entouré par de très bons rôles secondaires, et Jean Arthur montre encore une fois quelle actrice unique elle était…


NOTE : 8,5/10


dimanche 12 octobre 2014

HIS GIRL FRIDAY - La dame du vendredi




Réalisation : Howard Hawks
Société de production : Columbia Pictures
Genre : Screwball comedy
Durée : 92 min
Date de sortie : 11 janvier 1940 (USA)
Casting :
Cary Grant : Walter Burns
Rosalind Russell : Hildegard “Hildy” Johnson
Ralph Bellamy : Bruce Baldwin
Gene Lockhart : Shérif Peter B. Hartwell
John Qualen : Earl Williams


L’HISTOIRE

Lorsque Hildy Johnson, sa meilleure journaliste et ex-épouse, décide de démissionner et de se remarier, Walter Burns, le rédacteur en chef sans scrupules du Morning Post, met tout en œuvre pour l’en dissuader.


L’AVIS DE GENERAL YEN

Déjà mentionné à plusieurs reprises dans ce blog, His Girl Friday est le second « Grand Schisme » entre moi-même et mon compère Fu Manchu après The Lady Eve. S’il n’a pas accroché au film, je considère pour ma part cette screwball comedy comme un modèle du genre.

Plus que toute autre screwball, His Girl Friday possède le pouvoir de faire rire par sa marque de fabrique, des dialogues savoureux au rythme fou. Le réalisateur Howard Hawks voulant retranscrire dans le cinéma parlant la vivacité comique du muet, le débit de parole est extrêmement rapide : les acteurs se répondent du tac au tac dans un tourbillon de répliques acerbes et malicieuses, donnant au film un comique de mots d’une efficacité inégalable.




His Girl Friday a pour lui de réunir deux des meilleurs comédiens du cinéma classique américain : Cary Grant et Rosalind Russell.

Rosalind Russell joue Hildy Johnson, le personnage éponyme du film. La « Girl Friday », c’est elle : l’expression désigne en anglais l’assistant doué et utile du protagoniste, d’après « Man Friday », alias Vendredi, le compagnon de Robinson Crusoë. Hildy est la meilleure journaliste du Morning Post, elle a fait les quatre cents coups avec Walter Burns et lui est indispensable. Mais plus qu’une assistante, Russell campe une femme forte, qui a choisi de changer de vie en épousant un homme doux et humble, à l’opposé de son ex-mari.

“I wouldn't cover the burning of Rome for you if they were just lighting it up!”

C’est donc une femme désirée de tous côtés que l’on voit évoluer à l’écran, et qui tente de résister à sa « pulsion journalistique » face aux menées du personnage de Cary Grant. « Roz » Russell est irrésistible dans ce rôle par ses mines comiques et son ton caustique. Une révélation.

Incarnation la plus réussie du journaliste sans scrupules, Walter Burns, interprété par Cary Grant, est un mélange de roublardise et de pugnacité. C’est un homme sûr de lui, prêt à tout pour arriver à ses fins tant dans sa vie professionnelle que personnelle, les deux se confondant dans le personnage de Russell. Grant, roi de la screwball, réussit l’exploit de rendre attachant et drôle un personnage cynique et manipulateur.

“Walter, you're wonderful, in a loathsome sort of way.”

Le film entier est une satire du journalisme, un monde où toutes les énergies sont dirigées vers l’obtention du Graal suprême : le scoop ; un univers sans foi ni loi où la fin justifie toujours les moyens. C’est pourquoi His Girl Friday flirte souvent avec l’humour noir, un outil de dénonciation puissant.

“A journalist? Hell, what does that mean? Peeking through keyholes?”

L’absurde et le burlesque se côtoient sans cesse scène après scène, tandis que l’on part à la chasse aux informations avec nos deux héros, avides de recueillir le témoignage d’un condamné à mort. La force de ce film est de ne pas se prendre au sérieux : l’odieux est tourné en ridicule, ce qui permet à la fois le rire et la critique. Que dire ainsi de cette meute de reporters se jetant sur leurs téléphones, invectivant leurs interlocuteurs à travers le combiné et enjolivant une même nouvelle chacun à sa manière !

Conclusion

Brillant par ses dialogues et son rythme innovant, solide sur le fond car parodique et critique, His Girl Friday est une screwball comme je les aime, alliant toutes les formes de comiques possibles, ce qui fait sa force. Certes, la satire est noire et osée, mais le film fait mouche. Indéniablement, il sort du lot.


NOTE : 8,5/10