dimanche 19 janvier 2020

MEILLEURE ACTRICE 1949


Le Général Yen passe en revue les meilleures actrices de 1949, une année exigeante qui a demandé beaucoup de recherches pour trouver les perles rares. Mais le jeu en valait la chandelle.


La favorite du Général 

MADELEINE CARROLL pour The Fan

Dans le dernier film de sa carrière, Madeleine Carroll nous offre ce qui est certainement sa performance la plus éblouissante. Sans surprise, vous noterez que j'ai eu un gros coup de cœur pour son personnage, l'aventureuse Mrs Erlynne aux manières exquises et aux multiples facettes, dont l'ombre plane sur l'avenir du mariage de Mr et Mrs Windermere... L'actrice est excellente dans tous les registres, ce que son rôle lui permet grâce aux flashbacks, qu'elle soit une vieille dame énergique, une belle tentatrice piquante et joueuse, ou une femme protectrice et tendre. Le contraste entre ces deux derniers aspects, qui n'est pas sans rappeler le style d'une Greer Garson, est bonifié par le remarquable talent qu'à toujours eu Madeleine : la combinaison entre un jeu "froid" typique d'une blonde hitchockienne, qui renforce la dangerosité de "l'étrangère" aux intentions inconnues, et un jeu "chaud" empli d'émotion (ah cette voix, ce regard...), qui permet à son personnage de se livrer, d'abattre ses cartes, et de briser sa carapace. Ici, Madeleine n'a jamais été aussi charismatique et n'a rien perdu de son élégance et de sa distinction habituelles, ce qui permet à ma "Reine de cœur" de réaliser un très beau "chant du cygne".


Le tableau d'honneur

Elles l'ont courtisé, il ne les a pas élues. Mais le Général est magnanime, voyez plutôt :

SUSAN HAYWARD pour House of Strangers Véritable boule d’énergie, Susan se hisse dès sa première apparition au niveau d’un Richard Conte pourtant à son sommet dans le rôle principal. Elle fait de ce qui aurait pu être un second rôle un petit chef d’œuvre de performance, qui, sans être le maillon essentiel du film, l’enrichit grandement. Il faut bien dire que le charisme de la demoiselle est peut-être déjà à son apogée, tant sa classe physique, sa présence ferme et son caractère un peu mutin (les caractéristiques que j’aime chez elle) sont déployés à la perfection. L’alchimie avec Conte est indéniable et procure des moments savoureux, d’autant qu’elle étale face à lui toute sa sensualité pour le séduire.

PATRICIA NEAL pour The Fountainhead : Son charisme puissant mêlé d'une sensualité brute n'a probablement jamais été aussi fort que dans ce film, dans lequel Patricia Neal façonne avec Gary Cooper une relation atypique, pleine d'attraction sauvage. Certes typique de l'actrice, son jeu flamboyant est ici poussé dans ses extrémités, pour créer un personnage indomptable et rempli d'une arrogance qui rend ses apparitions hautement jouissives.

JENNIFER JONES pour Madame Bovary : Pour le moins époustouflante en héroïne tragique, Jennifer Jones réussit à composer une excellente interprétation d'Emma Bovary, qui sous ses traits devient délicieusement ambiguë : superficielle et agaçante mais également terriblement attachante. Si la nuance est portée par le jeu de l'actrice, elle est fortement soutenue par le propos du film, qui souhaite montrer la jeune fille "innocente" (car formatée par ses lectures de contes de fées) derrière la "Lilith" pécheresse. Et bien sûr, j'admire d'autant plus la performance de Jennifer Jones que l'histoire de Madame Bovary n'est absolument pas ma tasse de thé...

- ANN SOTHERN pour A Letter to Three Wives : La lutte pour la dernière place est rude dans mon esprit, mais je ne peux pas résister à l'idée d'avantager l'une de mes "actrices de second rang" préférées, Ann Sothern, qui devance donc Linda Darnell (A Letter to Three Wives) et Jeanne Crain (Pinky). Car dotée du rôle le plus ordinaire parmi les trois "épouses" (une femme de classe moyenne qui essaie tant bien que mal de concilier sa carrière et son époux), elle parvient à donner subtilité et profondeur à son personnage : elle suscite la sympathie dès le segment de Jeanne Crain par son aura protectrice ; elle est hilarante dans ses tâches de maîtresse de maison ; son alchimie avec Kirk Douglas est patente tant dans les moments d'affrontement que de complicité ; et bien sûr, elle gère à merveille le petit manège de son héroïne au cours du dîner avec  son horrible patronne et son mari, entre anxiété et espoir, complaisance et fierté, désarroi et ténacité, mais toujours en gardant la tête haute. Et puis voilà, je suis toujours aussi énamouré du style d'Ann Sothern, qui a su trouver un équilibre parfait entre attitudes élégantes, force de caractère et expressions comiques (sa fameuse moue !).


dimanche 5 janvier 2020

MEILLEURE ACTRICE 1938


Le Général Yen passe en revue les meilleures actrices de 1938, une année qui voit des légendes en devenir poser des jalons importants dans leur riche carrière, et permet à plusieurs de ses favorites de briller dans certains de leurs meilleurs rôles. 


La favorite du Général 

KATHARINE HEPBURN pour Holiday

En l'état actuel de mes connaissances, Holiday est le meilleur film de Katharine Hepburn. Et il va sans dire que sa propre interprétation n'y est pas pour rien. Elle incarne Linda, un personnage haut en couleur mais qui souffre d'être le "mouton noir" d'une famille aisée. Sans se départir de son habituel style théâtral, qui convient bien à l'atmosphère de ce film adapté d'une pièce, l'actrice brille par sa façon adorable d'exprimer l'intensité des émotions passionnées de Linda : de sa voix un peu nasillarde, elle lance au spectateur toute sa fragilité, son mal-être, son désir d’altérité. De plus, l'immense potentiel comique du personnage est exploité de sorte à en faire ressortir tout le charme, sans parler de son inévitable entente avec Cary Grant, encore une fois une réussite qui porte le film du début à la fin.


Le tableau d'honneur

Elles l'ont courtisé, il ne les a pas élues. Mais le Général est magnanime, voyez plutôt :

MYRNA LOY pour Test Pilot : Dans la performance la plus charismatique de sa carrière, Myrna marque le film de son empreinte au rythme caractéristique de sa jolie voix éraillée, naviguant avec aise entre les styles bien virils des deux protagonistes masculins (Clark Gable et Spencer Tracy). Elle déploie des trésors d’émotivité avec un tel naturel que l’on ne peut que ressentir les doutes et les craintes des épouses de ces aviateurs trompe-la-mort auxquels le film rend un bel hommage.

CONSTANCE BENNETT pour Merrily We Live : Dans cette screwball comedy proche de My Man Godfrey, Constance joue l'une de ses meilleures partitions en femme mondaine qui affronte l'irruption dans sa famille d'un clochard moins rustre qu'il n'y parait. Sa classe comique d'une grande finesse tient du Marlene Dietrich et du Carole Lombard tout à la fois, tandis que son alchimie pétillante avec Brian Aherne contribue à faire de la relation entre les deux protagonistes un marivaudage très réussi.

MARGARET SULLAVAN pour Three Comrades : Ce film au scénario tout simple est sublimé par le jeu de son actrice principale. Margaret scintille à l’écran au milieu des trois protagonistes masculins, avec qui elle noue des liens complices aussi forts que différents. Son charme discret mais profond déferle, et l’on comprend mieux pourquoi chacun de ces fiers gaillards, soldats vétérans, fondent en sa présence. Physiquement, elle parait fragile, et pourtant : elle dégage un charisme splendide et chaque mot qu’elle prononce de sa voix légèrement enrouée ne fait que le confirmer.

- BETTE DAVIS pour Jezebel : Cette première collaboration avec William Wyler marque vraiment un tournant dans la carrière de l'actrice, et ce n'est pas un hasard si c'est surtout dans ses films qu'elle me plaît réellement. Bette déploie ici toute son aura pour séduire son public avec un personnage de "Southern Belle" pourtant assez antipathique, et pour bâtir une romance tempétueuse, donc captivante, avec Henry Fonda. Sa performance s'essouffle cependant sur la fin du film, qui se concentre moins sur la personnalité de Julie et plus sur des événements sur lesquels elle n’a pas de prise.