Société de production : Metro-Goldwyn-Mayer
Genre : Comédie romantique
Durée : 99 minutes
Date de sortie : 12 janvier
1940 (USA)
Casting :
James Stewart : Alfred Kralik
Margaret Sullavan : Klara Novak
Margaret Sullavan : Klara Novak
Frank Morgan
: Hugo Matuschek
L’HISTOIRE
Dans une petite boutique de
Budapest, un jeune employé correspond par lettres interposées avec une femme qu’il
n’a jamais vue, avant de se rendre compte qu’elle n’est autre que sa nouvelle
collègue, qu’il ne peut pas supporter…
L’AVIS
DE FU MANCHU
The Shop around the corner est sans doute mon film préféré d’Ernst
Lubitsch, et, comme souvent avec ce réalisateur, m’a beaucoup marqué par son
atmosphère très particulière… Il y a un brin de nostalgie dans ce film, un
charme suranné amplifié par le décor – Budapest, soit la vieille Europe au début
du XXème siècle – mais aussi par le nom des lieux et des personnages :
Kralik, Novak, Matuschek & Compagnie,
etc.
Dans cette ambiance si singulière, qui donne l’impression d’évoluer
dans un conte de Noël, comme hors du temps, nous voici au cœur d’un magasin de
maroquinerie de Budapest, à la rencontre de ses employés : tous ont une
personnalité bien à eux, du vieil homme bonhomme un peu perdu au jeune coursier
volubile et farceur. Parmi eux, Alfred
Kralik (James Stewart) est un
homme comme les autres, vendeur modèle à la vie simple et paisible, et qui
attend peu de la vie. Qu’il ait été invité à dîner par son patron, le grand Mr.
Matuschek, et qu’il ait parlé à la grande et belle Mme Matuschek, lui ne s’en
soucie guère. Car une seule chose lui importe dans son quotidien morne :
les lettres qu’il échange depuis quelque temps avec une femme inconnue, échange
qui a commencé par hasard, quand il a répondu à une annonce qu’elle avait fait
paraître dans un journal. Conversations par plumes interposées, mais ô combien
enrichissantes pour Mr Kralik, qui ne rêve qu’à sa dulcinée de papier…
L’histoire de The Shop around the Corner est remarquablement
introduite, car c’est bien dans un univers somme toute « banal » qu’elle
intervient : ces lettres échangées sont le point de départ de l’intrigue,
et c’est l’arrivée de Klara Novak (Margaret Sullavan) qui va chambouler le
monde de Kralik. Avec elle, il ne s’entend pas. Ils ne se comprennent pas,
chaque phrase est interprétée de travers, et pourtant… Et pourtant, le scénario
de l’histoire joue des tours aux deux jeunes gens, puisque la personne qu’ils
admirent plus que tout au monde, qu’ils rêvent de rencontrer sans l’avouer, est
ce même collègue dont ils ne supportent plus la conversation !
Cette situation est très intéressante, et tout au long du film, ces
deux relations seront étudiées et opposées : quelle est la meilleure
relation ? Celle entre deux personnes qui ne se sont jamais rencontrés,
mais s’admirent et se plaisent à distance, ou celle entre deux personnes qui s’aiment
car se connaissent physiquement ? Au premier abord, l’on pourrait penser
que la première est plus « pure » : ils tombent amoureux pour
leurs pensées et leurs idéaux, pas pour leur physique. Mais Lubitsch montrera
finalement que, non pas que la seconde soit « meilleure », elle est
la seule qui soit souhaitable car c’est en se rencontrant, en se « voyant »,
qu’un homme et une femme se plaisent et tombent amoureux. Si la question d’affinités
par goûts est abordée dans les lettres à distance, rien ne vaut de se côtoyer
au quotidien pour s’apprécier (thème étrangement moderne, que l’on pourrait
appliquer aux sites de rencontre en faisant les mêmes remarques).
Cela dit, le film montre aussi que ce n’est pas parce que deux
personnes ne se plaisent pas au premier abord qu’ils ne sont pas faits l’un
pour l’autre : au fond d’eux même, Kralik et Klara ont une personnalité
très semblable puisqu’ils se sont plu en se livrant par écrit ; il leur
faut juste apprendre à se (re)connaître, à se fréquenter.
“Well, if you don’t like Miss Novak, I can tell you right now you won’t like that girl – Why ? – Because IT IS Miss Novak…”
James Stewart joue Mr
Kralik, et est une fois de plus excellent dans ce rôle de jeune homme simple, qui cache sous ses airs discrets et maladroits
un charme certain… Comme toujours dans leurs films en commun, il semble parfois comme ensorcelé
par Margaret Sullavan, qui
interprète Miss Novak, et leur alchimie est palpable – et pour cause, ils se
connaissaient bien avant leurs débuts d’acteurs… Pour l’anecdote, Sullavan aurait
d’ailleurs joué un rôle très important dans le début de la carrière de Stewart
(merci Margaret !).
Ses regards affectés devant ce qu’elle pense être un homme sans aucun
intérêt sont souvent très drôles, et ses « Mister Kralik » répétés
sans cesse avec un regard de dédain ponctuent le film pour notre plus grand
bonheur (« Ooh, Mister KRALIK !!! Kss kss… »). On remarquera d’ailleurs
que le choix des noms des personnages constitue un élément comique du film,
alors que ce sont des noms très courants en Hongrie (surtout Novak). Mais
entendre le nom de « Kralik » à tout bout de champ dans un dialogue
en anglais engendre un effet de comique de répétition très efficace…
“Mister Kralik !… It’s true we’re in the same room… but we’re NOT in the same planet”
Les dialogues, justement, sont très bien construits, et il m’a vraiment
fallu revoir certains passages plusieurs fois pour en saisir toute la subtilité
(il est vrai que l’anglais n’est pas non plus ma langue maternelle…). Le film n’en
est par conséquent que meilleur et plus appréciable à chaque revisionnage, et c’est
bien la marque d’une très bonne œuvre…
Conclusion
Un film de Lubitsch et ses ambiances si surannées, plus James Stewart
et son air sympathique, plus Margaret Sullavan et son alchimie avec le dernier
cité, voilà de quoi faire une comédie romantique des plus réussies. The Shop
around the corner, c’est un petit peu l’ancêtre des célèbres rom-coms des années 90 à la Tom Hanks et Meg Ryan… Petit hommage en passant, dans You’ve
got mail (1998), la librairie de la jeune femme s’appelle d’ailleurs… « The
Shop around the Corner ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire