Société de production : Columbia
Pictures
Genre : Aventure
Durée : 121 minutes
Date de sortie : 15 mai
1939 (USA)
Casting :
Cary Grant :
Geoff Carter
Jean Arthur
: Bonnie Lee
Rita
Hayworth : Judith « Judy » MacPherson
Richard
Barthelmess : Bat MacPherson
Thomas
Mitchell : « Kid » Dabb
Allyn Joslyn
: Les Peters
Sig Ruman :
John « Dutchy » Van Reiter
L’HISTOIRE
Une jeune femme débarque dans une
petite ville portuaire d’Amérique du Sud, où elle fait la connaissance des
aviateurs qui assurent le transport du courrier au-delà de la Cordillère des
Andes, dans des conditions épouvantables et souvent très dangereuses.
L’AVIS DE FU MANCHU
Aujourd’hui voit le retour de
Jean Arthur sur Films-Classiques,
puisqu’après Mr. Smith goes to Washington où elle était associée à James
Stewart, la voici avec Cary Grant dans un film sorti la même année, Only
Angels have wings (Seuls les Anges ont des ailes).
Cette fois-ci, pas d’intrigue
politique au menu, mais une plongée dans un monde exotique et impitoyable,
celui des aviateurs de l’Aéropostale chargés de transporter le courrier dans
les Andes. Cette immersion dans ce monde « d’hommes » est rendue de
manière très intéressante dans le film, où l’on suit le personnage de Bonnie Lee (Jean Arthur), musicienne dont le bateau a fait escale dans ce petit
port d’Amérique du Sud, découvrir la ville, ses habitants, son exotisme et,
finalement les seuls autres Américains présents sur place : les aviateurs.
Avec elle, on découvre le quotidien de ces hommes rudes, courageux, risquant
leur vie pour mener à bien leur mission, comme désabusés par leur sort
incertain mais prêts à continuer leur travail coûte que coûte…
Dans cet univers, peu de place
est faite aux femmes, ni aux sentiments : pourquoi s’engager quand tout
peut disparaître d’une minute à l’autre ? Forcés de continuer à vivre
après la mort d’un des leurs, les aviateurs l’oublient comme s’il
n’avait jamais existé : façade impitoyable, mais cœur lourd, car il faut
bien continuer à vivre, et y retourner, encore et encore, dès que retentit l’appel…
Geoff Carter (Cary Grant),
le patron des aviateurs et le meilleur d’entre tous, est l’incarnation de l’aventurier,
rude, misogyne, passionné par son travail mais qui ne l’abandonnerait pour rien
au monde. Cary Grant l’interprète de très grande manière, donnant au personnage
une profondeur qui va au-delà de son cynisme et de sa goujaterie du premier
abord : c’est à un homme blessé que l’on a affaire, rongé par les pertes
humaines (la mort de ses confrères aviateurs, dont il se sent responsable) et
sentimentales (la traîtrise de la femme qu’il aimait), et se protégeant par son machisme et une insensibilité de façade pour éviter de souffrir à nouveau.
Face à lui, Jean Arthur est
Bonnie Lee, l’étrangère à ce monde,
la femme normale à qui l’on va s’identifier
et qui nous permet d’entrer dans le film. Comme elle, l’on va d’abord être
choqué par l’absence d’humanité dont semblent faire preuve ces hommes, puis
comme elle, on va les comprendre et les estimer. Sûre d’elle, pleine de vie,
elle se fait rapidement accepter par les hommes qui l’entourent, et le
potentiel comique de Jean Arthur réapparait le temps de quelques scènes pour
alléger l’atmosphère du film (le piano, la scène du bain). Son alchimie avec
Cary Grant prend peu à peu forme, et, pleine de surprises, c’est elle qui
décide de rester pour tenter l’aventure d’une romance avec lui.
Dans ce film, deux personnages
féminins se font d’ailleurs face : Bonnie Lee (Jean Arthur), la femme
forte, capable de prendre ses propres décisions, voyageant seule, sûre d’elle et
déterminée à se faire respecter en tant que femme. Et Judy (Rita Hayworth), la
belle jeune femme, plus effacée, dans l’ombre de son homme et prête à y rester.
Entre les deux, le film se positionne clairement, et seule une femme comme
Bonnie était à même de séduire à nouveau un Geoff désabusé par la gent féminine
et ne s’en cachant pas.
Centré sur Jean Arthur dans sa première partie, le film s’intéresse beaucoup plus aux pilotes dans la deuxième, avec l’arrivée d’un personnage très
intéressant : Bat MacPherson (Richard Barthelmess), le traître, honni
par ses pairs, mais dont la petite entreprise a désespérément besoin pour
survivre. Calme, taiseux, il accepte sans broncher les missions les plus
dangereuses, et rachète par son courage ses erreurs passées : symbole de
ces hommes qui, perdus au milieu d’un monde étranger, sont comme forcés de
tirer un trait sur le passé pour se fixer sur leur (court) avenir…
Symboliques aussi de ce monde
enchanteur et sans pitié, telle la jungle sud-américaine, les scènes des
musiciens placées au début et à la fin du film : cette musique douce et
exotique, qui enchante Jean Arthur au début du film, a une résonance beaucoup
plus mélancolique quand le film prend fin, comme une parenthèse dans ce monde
si particulier qui se referme : lancinante, la mélopée semble pleurer les
morts et célébrer le courage de ces aventuriers décidément hors du commun.
Conclusion
Only Angels have wings nous
offre donc un film d’aventure très bien construit, nous
plongeant dans le quotidien de ces hommes rustres puis nous montrant la part d’humanité
qu’il reste encore en eux, et qui les aide à tenir dans cet endroit coupé du
monde. Cary Grant porte le film côté masculin, bien entouré par de très bons
rôles secondaires, et Jean Arthur montre encore une fois quelle actrice unique
elle était…
NOTE : 8,5/10
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