Au terme d’une traversée transatlantique sans accroc, le Général Yen passe en revue le meilleur de ses découvertes en matière de cinéma classique français, des années 1930 aux années 1950 (Partie 3 sur 4).
Acte Troisième : les réalisateurs
Il est le maître du suspense et du "film noir" à la française. Si Clouzot n'a pas son pareil pour dépeindre avec une misanthropie certaine les vices et malheurs de ses contemporains (ainsi, tous les personnages du Corbeau ont quelque chose à se reprocher), il est aussi et surtout un créateur d'atmosphères comme je les aime. Sa force : savoir conjuguer des dialogues percutants et une mise en scène dynamique destinée à faire "entrer" le spectateur dans son film. A noter également sa réussite dans le registre comique (L'assassin habite au 21), sur fond d'enquête policière (on ne se renie pas !).
S'il est presque aussi sombre, l'univers de Grémillon est plus statique et classique que celui de Clouzot. Ses films ont un tempo plus lent, mais ils évitent l'écueil que je reproche par exemple à Renoir ou Ophüls : l'ennui. Car Grémillon est maître dans deux choses, primordiales pour un cinéaste : savoir créer une atmosphère et construire des personnages inoubliables. Pour la première, il semble nous transporter in situ grâce à sa patte naturaliste et son esthétique poétique. Pour les seconds, il leur donne une âme : le caractère taciturne des marins bretons, la mélancolie d'une maîtresse ou la dignité d'une épouse trompée.
N°3 : Marcel Carné
Auteur des grands chefs d'oeuvre du réalisme poétique, Carné est le peintre du lyrisme sur grand écran. Si ses personnages sont moins séduisants que ceux de Grémillon et si ses films n'ont pas la même énergie que ceux de Clouzot, il possède la recette pour multiplier les réussites. Peintre du social, épaulé par les dialogues et scénarios de Prévert, il compose des films à fort impact émotionnel et sait mettre en valeur le charisme de ses acteurs masculins (Jean Gabin) comme féminins (Arletty, Michèle Morgan).
A suivre...